De Saint-Thomas à Lazare

De la réalité de ce papier, de ce crayon, de ces mots, à l’essence qu’ils portent.

Quel immense parcours s’étend de l’un à l’autre ?

Jusqu’à l’instant de grâce où la porte s’ouvre, où la Lumière jaillit.

De la réalité palpable de St-Thomas à l’éveil miraculeux et instantané de Lazare.

Chance ou poison dans un monde de plus en plus matière ?!

Combien d’hommes célèbres connurent cet instant de grâce ? De Bouddha assis sept longues années au pied de son arbre à la main de Jésus posée sur les yeux de l’Aveugle ou ouvrant le sépulcre de Lazare, à Gandhi, Mandela, plus proches de nous dans l’histoire pavée de milliers d’êtres éveillés ?

Combien d’exemples décortiqués, remontés, remaillés, portés de langue en langue, de feuille en feuille, d’esprit en esprit, combien de sueur et de migraines pour faire comprendre l’incompréhensible ?

La magie de l’éveil ne peut se vivre que dans le ressenti.

L’escalade rapportée d’une montagne ne peut que s’imaginer, se construire d’images ! Pour en saisir l’Essence, il faut sentir ses orteils glissés dans les grosses chaussettes de marche, le cœur bondissant d’attente et d’espoir, la tête penchée et appliquée sur le laçage d’impressionnantes godasses qui porteront les pas vers le Sommet.

Là commence le vécu ! Là commence le ressenti !

Le roulement des cailloux sous les pas, la sueur dégoulinant le long de l’échine, le regard porté haut dans le ciel, deviennent déjà l’Éveil !

Qui est en marche et comprend la féerie de l’instant ?

Qui comprend que le premier, tout premier souffle correspond au contact de la laine autour des pieds ?

Qui comprend que les méandres de la vie, joies et chagrins, bonheurs et tristesses, ne sont que l’escalade vers le sommet que nous portons en nous ?

Qui se perd aux griffures des ronces ou à la fraîcheur de la source désaltérante et oublie l’ivresse qui nous conduit pas à pas pour se révéler bientôt dans une explosion ?

La vie nous porte ou nous secoue selon qu’on la comprend ou qu’on la contre.

Chacun arrive avec son itinéraire, sa carte fléchée et sa boussole. Les documents de l’autre ne sont que charabia si nous n’avons pas le même décodeur.

Combien de flots de salive inutile, d’encre écoulée, pour tous les St-Thomas que nous sommes, prisonniers de la réalité matérielle ?

Combien de soleils, combien de phares, combien de petites lanternes disséminées partout de par le monde parviendront à poser la main sur les yeux des aveugles ?

Minuscule luciole cachée dans une boîte noire, ou immense rayonnement lumineux, chacun des sept milliards d’humains que porte la terre a en lui la goutte d’eau qui contient l’océan.

De même le minéral, le végétal et l’animal, si ce n’est qu’eux sont partie intégrante de la conscience et n’ont pas à se le prouver.

Le libre arbitre a ceci de merveilleux qu’on peut à l’envi ignorer le chemin, au risque malgré tout d’écorchures multiples, ou ouvrir les milliards de cellules qui nous composent à un début de compréhension que la matière cherche à nous cacher … ☺

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