Douleur et souffrance

Douleur :

J’ai un cor au pied. La douleur survient, lancinante. Il est là, sur mon orteil, à me regarder de son petit œil noir. La pluie menace et il me réveille. La douleur grimpe jusque dans ma jambe : il faudrait que je le soigne.

Souffrance :

Aïe ! Comme mon cor au pied me fait mal ! Impossible de mettre mes chaussures de marche. Et dire que demain je devais faire cette merveilleuse promenade que j’attends depuis un mois ! Pas de chance : en plus, ils annoncent un soleil magnifique. Si, au moins, il pleuvait, j’aurais moins de regret !

Et puis, Philomène va jubiler, elle qui me traite toujours de paresseuse. Je ne peux pas marcher, mais elle va croire que je renonce à la balade volontairement. Je crois qu’elle ne m’aime pas. De toute façon, Oscar, lui, va s’en réjouir : il ne me supporte pas ! Il court toujours en tête du groupe et se retourne en me regardant d’un œil critique et narquois pour voir si je suis le rythme.

Et puis, tous ! Ils seront sûrement contents que je ne puisse y aller : parfois, ils interrompent leur conversation quand je m’approche. Je suis sûre qu’ils disent du mal dans mon dos…

Etc., etc., etc. …

La douleur est une réalité du corps physique. Une pathologie s’installe à un endroit précis et génère une interférence dans le flux nerveux qui monte cerveau. Il s’agit d’y donner suite, selon nos convictions, soit en prenant un inhibiteur qui calmera la douleur, soit en recherchant la cause afin de la traiter et peut-être de résoudre le problème afin qu’il disparaisse.

La souffrance est une projection du mental. Elle fait feu de tout bois. Tel un fil d’Ariane déroulé patiemment, une idée « prend vie » dans notre lobe gauche et devient notre « réalité » du moment, par une suite de mécanismes aussi bien réglés qu’une montre suisse.

Il suffit d’un dixième de seconde d’inattention et la machine se met en marche, telle que monsieur Tinguely l’a si bien mis en pratique : cette pensée engendre telle autre pensée, qui débouche sur telle idée, et avant d’avoir pu dire « ouf » nous voilà avec dans la tête un périphérique parisien aux heures de pointes !

Tout l’art et la leçon maintenant réside à dénouer cet écheveau, qui, soyons-en sûrs, s’il n’est pas pris à temps, générera à n’en point douter ce nœud douloureux dans notre corps, jusqu’à la pathologie.

Inutile de citer les réflexes classiques très prisés, bien appris et assimilés afin de calmer notre mental fou comme :

  • manger une tablette de chocolat

  • allumer une cigarette

  • se river au poste de télévision ou à l’écran de l’ordinateur

  • etc…

Pourquoi apprend-on de tels comportements depuis la toute petite enfance plutôt que d’enseigner au plus tôt à se reconnecter à notre corps et à notre âme ? Probablement parce que toute une part de l’industrie deviendrait inutile.

Aussi complexe que cela puisse paraître, il en est pourtant d’une simplicité enfantine de ne pas laisser le train de nos pensées s’emballer : un état de conscience éveillée permet de saisir la pensée racine dès son arrivée, pour autant qu’on s’y entraîne un tant soit peu et qu’on s’y tienne.

Il est permis à chacun d’y arriver, pour autant qu’on en ait le désir et qu’on s’y penche avec bienveillance envers nous-même.

Ensuite, à chacun de trouver sa méthode pour calmer le mental; dans la plus abordable immédiatement, il y a la relation au souffle et au moment présent, de même la prise de conscience des fonctions du corps : je ressens mes pieds fermement posés sur le sol, bien au chaud dans leurs chaussettes, telles des racines ancrées dans la seule réalité, le moment présent.

J’ouvre mes narines et mes poumons et inspire une grande bouffée de ce moment présent. J’expire une à une ces visiteuses indésirables que sont mes pensées négatives par mes narines et ressens doucement mon plexus s’ouvrir, tel une fleur de lotus.

Je n’ai pas à combattre quoi que ce soit, juste à rester très vigilant(e) pour garder mes pensées centrées sur cette seconde-même et cette respiration-même.

Le mental va bien sûr se débattre un peu :

  • Hé ! Là-haut ! Qu’est-ce que tu fais ? C’est moi qui commande ! Attends ! Pense à cela …

  • Hé bien non ! Mon p’tit père ! À partir de maintenant, je reprends le gouvernail de mes pensées, de mon corps, de ma santé, de ma paix intérieure ! Je deviens magicien(ne) dans « l’âme agit », la magie c’est cela :

« Je suis le capitaine de mon âme,

le maître de mon destin ! » (Invictus)

La liberté c’est cela : choisir en toute connaissance de causes … et d’effets …

ps : mes rechutes ne me découragent pas ! Je suis tombée trois mille fois avant de savoir marcher ☺

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