9,5 sur 10

Je demandais à mes amies leur appréciation sur une réalisation culinaire que je trouvais personnellement délicieuse.

– neuf et demi !

– neuf virgule neuf !

– neuf et demi !

Je m’informais donc des dixièmes manquants ?

– la perfection n’existe pas ! On ne peut pas mettre un dix !

– (moi : toujours ce fameux « on » qui dicte sa loi) … et pourquoi ?

(J’avoue ne pas avoir saisi tout de suite leur motivation, toute à ma surprise).

– parce que la perfection n’existe pas, on peut toujours faire mieux !

Mon Dieu ! La course à la perfection, à mon humble avis, est en train de tuer notre « humanitude ».

Comment se réjouir de la vie si nous la trouvons incomplète en tout point ?!

Comment nous sentir bien si nous attendons toujours mieux ?!

Non pas que je recherchais leur appréciation pour me gausser (je n’étais pas la réalisatrice de ce biscuit aux abricots), seulement pour échanger un instant précieux de délectation (à mes yeux).

D’autre part, ce succulent gâteau n’en a eu que faire de nos considérations : il y été savouré avec félicité en quelques bouchées par tous les goûteurs.

Mais à moi, il me reste comme une amertume sur les papilles, un voile de tristesse sur le coeur.

Ma merveilleuse Terre-mère m’a donné la farine, les abricots, Elle a nourri les vaches qui ont permis le beurre, les poules qui ont permis les œufs et tous les humains grâce à qui la réalisation de ce biscuit divin a été possible. Et il est jugé imparfait !

Pauvre petit d’Homme, je comprends tous les maux en une seule petite phrase :

« La perfection n’existe pas » !

Mais si !

Elle est PARTOUT !

Dans ce ciel gris qui dégouline, qui va arroser mon jardin et me permettre mes ablutions quotidiennes.

Dans cet arbre qui ne ressemble à rien et me donne des pommes délicieuses.

Dans cette chaleur étouffante qui crie : « Voyez ma lumière ! Je suis votre miroir ! ». (Mais qui l’entend et qui comprend ?)

Dans cet homme ivre et sale de ses douleurs qui me dit combien je suis heureuse et chanceuse.

Dans cette personne en chaise roulante qui irradie d’amour et de lâcher-prise et devient mon maître.

Dans ces hommes politiques qui agacent tellement à vouloir tirer la couverture à eux et m’invitent à une discipline de fer qu’ils sont incapables de suivre. Le salut n’est pas dans l’avoir, pauvre petit d’Homme, personne ne vous a appris dans vos Hautes Écoles qu’il est dans l’être ?

Je suis et je me sens parfaite.

Parfaite avec mon petit ventre grassouillet qui ne correspond pas aux critères de minceur.

Parfaite avec mes dents imparfaites et mon nez de travers qui ne correspondent pas aux critères de beauté.

Parfaite avec ma maison en fouillis et mon jardin en bataille qui ne correspondent pas aux critères de richesse.

Je suis plus riche que le plus nanti des nantis et je me soumets de bonne grâce à toutes les exigences ; peut-être aussi parce que je suis aimée malgré toutes mes imperfections, mais surtout parce que

J’AIME !

sans limites, sans attentes, tout simplement

j’aime

Namasté

CC BY-NC 4.0 Cette œuvre est sous Licence Creative Commons Internationale Attribution-Pas d'Utilisation Commerciale 4.0.

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